Notre auteur aurait préféré être une meilleure cuisinière et servirait ses invités avec des plats d’un niveau étoilé. Qu’y a-t-il de mieux que d'apprendre avec les meilleurs ?
J’aime cuisiner. Et je pense que je cuisine plutôt bien. En tout cas mes amis et collègues affirment que je les invitent tous à dîner chez moi tous les deux à trois semaines. Je pense que je suis surtout bien organisé. Lorsque mes invités arrivent chez moi, le repas est presque prêt et, en tant qu’hôtesse, je peux me concentrer sur le vin, la conversation et tous les autres souhaits de mes invités. J’ai pour cela un carnet de huit à dix plats sous la main, qui sont faciles à préparer et qui font tout de même bonne impression. Un carré de veau au four, un tartare de truite, une soupe de poisson.
Le seul problème : Mes amis connaissent progressivement parfaitement mon livre de recettes, il devient difficile de continuer à les impressionner culinairement. Malheureusement, c’est précisément mon intention. Je suis donc à la recherche de nouveaux plats qui me permettraient de faire varier un superbe menu. Des plats qui peuvent être cuisinés facilement et qui surpassent aussi toutes les attentes. Qu’y a-t-il de mieux que d'apprendre avec les meilleurs ?
Alfons Schuhbeck est le roi du Platzl. Ici, au cœur du centre-ville de Munich, il gère trois restaurants, une école de cuisine, un magasin de glace, de muesli, un salon de thé et un magasin d'épices. Lorsqu’il n’est pas assis avec Markus Lanz, on le voit souvent courir dans le Platzl dans sa veste blanche de chef, en direction de son bureau ou dans la cuisine. Schuhbeck est indissociable de Munich, son visage est quasiment omniprésent. C’est le chef personnel du FC Bayern et, avec ses livres de cuisine bavaroise et ses plats qui sont souvent enracinés dans la région, il est connu bien au-delà des limites de la ville.
Je veux cuisiner les hors-d'œuvre avec lui et Schuhbeck a mis pour cela le chef de son plus jeune restaurant le « Fine Dining » à ma disposition. Maurice Kriefs attend le photographe et moi-même dans l’école de cuisine au rez-de-chaussée du « Südtiroler Stuben ». Tout est déjà prêt. Sur le comptoir noir, je découvre une grande quantité de substances colorées dans de petits bols, ainsi qu’un filet de poisson. « Il y a un filet d’omble de la région », explique Maurice. « En plus quelques purées colorées, des sauces et un peu de crème de citron. »
Maurice Kriegs retire la peau du filet d'omble, la place sur une assiette et la met de côté. Pourquoi ne jette-t-il pas la peau ? « Nous en ferons des chips par la suite en cuisine », explique-t-il en ajoutant qu’il faut placer la peau du poissons sur du papier cuisson et la laisser sécher au four. Je suis impressionnée et je ne peux qu’imaginer la surprise de mes invités devant quelque chose d’aussi extravagant que des chips de peau de poisson.
Maurice attrape le filet d'omble sur une assiette et l’enroule dans du film transparent. Je lui demande alors : « Il ne fond pas au four ? » Maurice explique que le film transparent peut supporter une chaleur allant jusqu'à 90 degrés. « Sous le film, les arômes se lient, il agit comme un petit four dans le four », affirme-t-il. Cela aussi c'était nouveau pour moi, mais cela ne me semblait pas seulement logique, mais il s'agissait aussi d'un conseil de chef précieux.
Les nombreuses sauces qui donnaient un air si printanier à l’assiette en arrière-plan semblent plus compliquées que la préparation de l’omble. « Mais on peut préparer les sauces et les purées à l’avance », explique Maurice. « Lorsque les invités arrivent, il suffit alors de mettre l’omble au four. » Pour finir, il faut ajouter un peu de beurre brun et de la ciboulette finement coupée sur le poisson. En effet, l’omble a un goût si tendre, que cela me donne presque les larmes aux yeux. La combinaison de sauces et de purées s'associent aussi parfaitement avec le poisson. Il faut l’admettre : La disposition (avec des pincettes !) nécessite un peu de temps et de patience, mais si nécessaire, selon Maurice, on peut aussi le faire en avance avant l'arrivée des invités.
« Et une fois que tout est cuisiné, il suffit de le sortir. » Une fois l’assiette dressée, Alfons Schuhbeck vient se joindre à nous. « Oui, parfait ! », dit-il en regardant l’assiette qui représente une mise en bouche exceptionnelle avec sa multitude de couleurs.
Christian Jürgens est l’un des meilleurs cuisiniers au monde. En 2013, il a obtenu une troisième étoile Michelin pour l’Überfahrt à Tegernsee (lac) et se maintient depuis au plus haut niveau culinaire. Je suis stressée avant ce rendez-vous. Cuisiner avec Christian Jürgens me semble être un petit sacrilège. Comme si j’avais demandé à Jil Sander de raccommoder le trou dans mon pantalon en jeans. Dès l’entretien préalable, Christian Jürgens a cependant répondu à mes e-mails de façon si amicale, que mon angoisse a disparu. J’ai déjà mangé à titre privé chez Christian Jürgens il y a cinq ans e jusqu'à aujourd’hui je peux encore réciter le menu dans mon sommeil. Il a tellement surpassé tout le reste qu’il me semblait jusqu’ici hors d’atteinte.
Nous rencontrons Jürgens avec son directeur de restaurant Peter Nasser dans l’école de cuisine à côté du restaurant Überfahrt. Son plat principal est aussi régional : Il y a de la selle de chevreuil.
L'école de cuisine est à la fois moderne et esthétique jusque dans les moindres détails : beaucoup de bois et de pierre naturelle à côté des équipements de cuisine de pointe. La selle de chevreuil est à côté du four, avec toutes les épices dont nous avons besoin pour la marinade.
Cuisiner avec Christian Jürgens me semble être un petit sacrilège. Comme si j’avais demandé à Jil Sander de raccommoder le trou dans mon pantalon en jeans.
Jürgens, passionné, concentré, strict, mais amical, veut commencer immédiatement. Ses gestes sont précis. En pilant le mélange d'épices, Jurgens explique à quel point un bon mortier est important pour ce travail. Ce n’est pas si facile de piler les épices aussi finement afin que la selle de chevreuil puisse être frottée avec.
Jürgens grille les os de chevreuil pour la sauce et ajoute des épices et du lard, une odeur agréable envahit immédiatement l'école de cuisine. Cela sent comme dans la cuisine de ma grand-mère décédée, chaud et agréable.
Ce que j'apprends avec Christian Jürgens : Ce n’est pas sorcier de préparer un plat principal parfait. La sauce peut être réalisée facilement, la selle de chevreuil dans la marinade semble aussi plus que faisable. Le plus grand défi consiste plutôt à maintenir la selle de chevreuil au degré de cuisson parfait (le chevreuil refroidit vite et sèche rapidement). Bien sûr la qualité des matériaux doit correspondre, même le meilleur cuisinier n’obtiendra qu’un plat moyen avec une viande de mauvaise qualité. Le chevreuil de l’Überfahrt est bien sûr d'une qualité parfaite. Ce qui m’impressionne également : Christian Jürgens garde son plan de travail propre avec un professionnalisme, qui semblent venir facilement, mais qui ont bien sûr été étudiés avec précision au fil des ans.
La selle de chevreuil de Christian Jürgens est si tendre à sa sortie du four, qu’on a presque pas besoin de couteau pour couper la viande sur l’assiette. Je me noie dans le plaisir. Je dois malheureusement encore préparer les ananas que Jürgens flambe délicatement avec un bec Bunsen. Avec lui, tout semble très facile. Alors que je prends le relais, ma main tremble. « Vous faites cela bien », affirme Jürgens en me souriant. Je suis fière même si je ne le crois pas vraiment.
Ma conclusion : Le plat principal parfait ! Le mélange d'épices est facile à préparer, la sauce aussi. Et si on flamble les ananas sous les yeux des invités, cela laisse assurément aussi une forte impression.
l paraît que le dessert d'un menu doit laisser une impression durable aux invités. Il paraît aussi que le nombre de pâtissiers de haut niveau en Allemagne est malheureusement restreint. Il n’y a pas beaucoup de cuisiniers qui ont la dextérité nécessaire et ils renoncent aux opportunités d’une carrière classique dans une cuisine étoilée. Il doit y avoir des chefs cuisiniers qui cherchent désespérément un bon pâtissier depuis des années.
Le restaurant « Alois » au premier étage de la maison traditionnelle Dallmayr ne connaît pas ce problème, car au côté du jeune chef cuisinier Christoph Kunz, travaille un homme célèbre dans toute la vaille pour ses desserts exceptionnels : Eugen Stichling. Avec lui, je parle de la conclusion de mon dîner parfait.
Stichling me montre comment cuisiner un cheesecake en quelques étapes (avant l’arrivée des invités) et comment préparer une décoction qui laisse un parfum envoûtant même des heures après avec du jus de citron, de la citronnelle, du sucre et du gingembre. Alors que je regarde le crumble de noix de coco, j’ai du mal à me retenir et je goute rapidement quelques miettes ; la douceur délicate avec l’expérience croustillante est délicieuse.
« Pour le dessert aujourd'hui, vous pouvez prendre un risque et aller dans la direction du salé. »
Eugen Stichling est pâtissier de cœur, il travaille à ce poste chez Dallmayr depuis dix ans déjà, l'année dernière le restaurant a été réaménagé et Christoph Kunz a été désigné comme nouveau chef de cuisine. Le concept du restaurant a également été modifié. « Nous misons sur une cuisine jeune et légère », explique Kunz. Sans faire de compromis sur la tradition classique de la maison. En effet, chaque soir un menu « Young Gourmets » est proposé à un prix très accessible pour les convives de moins de 30 ans.
« Les habitudes ont changé pour les desserts », explique Stichling. « Aujourd’hui, il faut tenter des choses et aller vers le salé. » L’époque où le choix de desserts classiques était composé de crème brulée et de mousse au chocolat sur un lit de fruits même dans la restauration gastronomique appartient au passé.
Le petit cheesecake semble en tout cas être une conclusion réussie pour mon menu parfait. Je suis impatiente de savoir ce que mes invités en penseront.
Lorsque j’invite mes amis à la maison trois semaines plus tard, j’essaie d'abord la recette de selle de chevreuil de Christian Jürgens. Le plat ne me prend même pas une demi heure de temps de préparation dans la cuisine, je suis détendue et mes invités sont vraiment séduits, surtout lorsqu'ils apprennent qu’il s’agit là quasiment d'une recette 3 étoiles. Je me réserve les hors d'œuvre et les desserts pour la prochaine invitation. Au final, les meilleurs invités sont toujours ceux qui ont une raison de revenir.